CADRISME ET SOCIALISME. UNE COMPARAISON URSS-CHINE

Deux choses sont claires concernant la nature des systèmes des pays socialistes, notamment de l'URSS et de la Chine: il ne s'agissait ni du socialisme au sens défini par ses théoriciens, ni d'une simple variante du capitalisme. Nous y voyons la tentative de construire une société de classe postcapitaliste, dont la classe dominante était celle des cadres (bureaucratie politique, cadres techniques et gestionnaires). Dans les pays socialistes, l'avant-garde révolutionnaire se transforma progressivement en minorité politique dirigeante, puis s'élargit dans une nouvelle classe dominante. L'arriération et l'héritage historique expliquent moins cette substitution de l'avant-garde aux masses, que les formes autoritaires et étatiques des régimes ainsi créés. L'acuité des contradictions internes de cette nouvelle classe fut sans doute le principal facteur de son incapacité à se réformer. Les cadres ne parvinrent jamais à trouver un compromis social -interne et vis-à-vis des classes dominées- susceptible de conduire à un dépassement durable du capitalisme, efficient et démocratique. Cette interprétation cadriste de l'histoire des pays socialistes est considérablement éclairée par la montée parallèle des cadres dans les pays capitalistes (que nous appelons capito-cadristes), malgré le présent épisode néolibéral.

MANAGERIALISM AND SOCIALISM. A COMPARISON BETWEEN USSR AND CHINA

Two clear observations stand out concerning the social nature of socialist countries, in particular USSR and China: they were neither socialist countries in the sense originally defined by socialist thinkers, nor a particular type of capitalist country. In our view, the experience of these countries was an attempt to build postcapitalist societies, whose ruling class was composed of managers and cadres (political bureaucracy, technical and managerial staffs). Within socialist countries, the revolutionary avant-garde gradually transformed itself into a leading political minority, evolving later into a new ruling class. The backwardness of these countries explains less the substitution of this avant-garde for masses, that the statist and authorititative forms of the new regimes. The acute internal contradictions within this new class is problably the main explanation of its inability to reform. Managers and cadres never found a sound social compromise -internally and vis-à-vis other dominated classes- allowing them to supersede capitalism in a new lasting, efficient, and democratic social configuration. In spite of the present hegemony of finance, the rise of managerial personnel within capitalist countries (managerial capitalism) sheds light on this managerial interpretation of the fate of socialist countries.


G. Duménil, D. Lévy, R. Lew, "Cadrisme et socialisme. Une comparaison URSS-Chine", 1999, Communication préparée pour le congrès Marx International II organisé par Actuel Marx, Paris du 30 septembre au 3 octobre 1998 : Cepremap et Modem, Paris, Université libre de Bruxelles.

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