MUTATION DU CAPITALISME ET ÉCHEC DU SOCIALISME

Cette étude se propose de remettre à l'ordre du jour l'interprétation de l'histoire de Marx, tant politique qu'économique, en l'absence d'une révolution prolétarienne. Le capitalisme se transforme et l'histoire continue. Une transformation majeure fut opérée au début du XXème siècle: la séparation de la propriété et de la gestion. La propriété se concentra dans la finance, la gestion devint le fait de larges états-majors de cadres et d'employés. Simultanément, le contrôle des travailleurs sur le procès de travail subit une nouvelle diminution. Nous voyons dans ces nouveaux caractères du capitalisme, des rapports de production hybrides, découlant de l'apparition d'un nouvel aspect cadriste (managérial). Il faut voir dans le cadrisme un nouveau mode de production potentiel. La succession du libéralisme, du keynésianisme et du néolibéralisme est l'expression de la confrontation entre les deux type de rapports: l'hégémonie, le relatif déclin et la remontée au pouvoir de la finance, dans sa tentative de préserver la domination des propriétaires du capital. En Russie, les boscheviks importèrent la nouvelle technique et les rapports de production cadristes, du capitalisme avancé. De nouvelles fonctions d'objetifs furent définies, distinctes de la maximisation du taux de profit. La prise du pouvoir par Staline donna à cette voie radicale vers le cadrisme ses caractères autoritaires et étatistes. Ce système se révéla peu efficient. Son incapacité à se réformer ne laissa d'autre option que la présente tentative de retour au capito-cadrisme standard, sous la conduite de la finance.

THE MUTATION OF CAPITALISM AND THE FAILURE OF SOCIALISM

This paper is an attempt to revive Marx's interpretation of history, politics and economics, in the absence of a proletarian revolution. Capitalism is transforming itself and history is still evolving. At the beginning of the 20th century, a major transformation occurred: the separation of ownership and management. Ownership was concentrated within Finance, management was transferred to large staffs of managerial and clerical personnel. Simultaneously, the control by the workers in the labor process was diminished. We interpret these new features of capitalism as a hybridization of the relations of production, resulting from the emergence of a new managerial component. Managerialism represents a potential new mode of production. The sequence of liberalism, keynesianism and neoliberalism (in the European sense of the term) is the expression of the successive hegemony, relative decline, and the new rise to dominance of Finance, in its attempt to maintain the power of the owners of capital. In Russia, the bolsheviks opted for the new technology and managerial relations of production of advanced capitalist countries. New social objective functions were defined, distinct from the maximizing of the profit rate. The rise of Stalin to power gave this radical road to managerialism its specific authoritarian and statist features. This system proved quite inefficient. Its failure to reform itself left no other option than the present attempt to return to standard managerial capitalism, under the leadership of Finance.


G. Duménil, D. Lévy, "Mutation du capitalisme et échec du socialisme, pp. 155-182", 1999, in B. Chavance, É. Magnin, R. Motamed-Nejad, J. Sapir, Capitalisme et socialisme en perspective. Évolution et transformations des systèmes économiques, La Découverte : Paris.
Version préliminaire: Communication préparée pour le colloque Évolution et transformation des systèmes économiques: Approches comparatives du capitalisme et du socialisme, organisé par le CEMI-EHESS et le GERME-Université Paris 7, Paris, juin 1998

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